Crocothemis nigrifrons (Kirby, 1894)

Crocothemis nigrifrons mâle, Australie (NT), Rum Jungle Lake, 16/04/2022
Crocothemis nigrifrons mâle, Australie (NT), Rum Jungle Lake, 16/04/2022

Après avoir déjà vu 4 espèces de Crocothemis rouges, Crocothemis nigrifrons est surprenant par sa couleur bleue, mais la forme générale, l’abdomen aplati, sont bien conformes. Kirby s’est lui-même fait abuser par sa couleur puisqu’il l’a décrit sous le nom d’Orthetrum nigrifrons. On retrouve également la ligne noire plus ou moins marquée sur l’abdomen, la partie postérieure des yeux bleus.

En revanche, la coloration du thorax est bien différente de celle de l’abdomen, la costale post nodale est jaune, et la face et le front (!) sont d’un noir métallique (Black-headed Skimmer). Je n’ai trouvé les mâles matures que sur l’eau et je n’ai jamais réussi à m’en approcher de façon satisfaisante ; toutes les photos ont été faites d’un peu trop loin, souvent au flash. Les femelles et les mâles immatures trouvés à distance de l’eau ont été plus faciles à approcher.

On note comme la base des ailes postérieures ne porte qu’une faible zone ambrée.
Il mesure environ 46 mm ce qui en fait un sujet un peu plus long que notre Crocothemis erythraea.

Ci-dessus, on observe que les vieux mâles noircissent, perdant même par endroits la couverture pulvérulente bleue.
La position dite « en obélisque » est salutaire pour les Libellulidae Australiens (diminuant ainsi la surface du corps exposé au soleil), qui défendent leur territoire en plein soleil, sachant que la température à l’ombre était, comme d’habitude…, de l’ordre de 38° C.

Comme presque toujours pour les Libellulidae, les mâles immatures sont peu colorés et partagent leurs teintes avec les femelles. De ce fait, ils ressemblent aux immatures de notre Crocothemis erythraea, car on note chez les jeunes (et les femelles) l’absence de coloration noire sur le front et la face.

Crocothemis nigrifrons mâle immature, Australie (WA), Marigu billabong, 23/04/2022
Crocothemis nigrifrons mâle immature, Australie (WA), Marigu billabong, 23/04/2022

L’abdomen de la femelle est peut-être un peu plus large, sinon c’est la copie du mâle immature, sauf… la fameuse lame vulvaire des femelles des Crocothemis, presque perpendiculaire à l’abdomen que l’on voit très bien sur la photo ci-dessous. Mais sur photos, rien ne la distingue de nos femelles Crocothemis erythraea.
Celle-ci porte en plus sur les ailes droites ce qui me semble être des diptères parasites, probablement du genre Forcipomyia.

Crocothemis nigrifrons femelle, Australie (NT), Roper Creek, 18/04/2022
Crocothemis nigrifrons femelle, Australie (NT), Roper Creek, 18/04/2022

C’est un Odonate commun en Australie, en tout cas dans les zones costales ; sa carte de répartition sur le guide (3) le montre quasiment tout autour de l’ile. Cependant, dans le dernier travail de Ian Endersby (2), il est surtout présent sur la côte Est, là où il y a des observateurs (!), avec quelques données étonnantes dans le sud du Territoire du Nord, soit en plein centre de l’Australie. Je me méfie un peu, car je viens de faire enlever une donnée de C. nigrifrons sur l’Atlas of Living Australia (excellent, par ailleurs) qui montrait une photo de Diplacodes haematodes ; celui-ci ressemble en effet à un Crocothemis… mais il est rouge.

Crocothemis nigrifrons mâle immature, Australie (NT), Gungarre Walk (Kakadu), 02/05/2022
Crocothemis nigrifrons femelle, Australie (NT), Gungarre Walk (Kakadu), 02/05/2022

Crocothemis, du grec crokos – qui a donné crocus en latin – safrané en référence à la couleur de la base de l’aile et de Themis – déesse grecque de l’ordre, de la justice. Hagen en 1861 a créé plusieurs noms de genres terminés par le suffixe Themis, sans doute parce que d’autres noms de libellules comportaient des noms de dieux comme Echo ou Nehalennia. Le nom de la déesse de l’ordre est particulièrement bien adapté à la taxonomie, science qui vise à décrire et ordonner les familles, genres et espèces.
Nigrifrons est plus évident, du latin niger, noir et frons, front, cela en référence à la face noire de cet odonate.

Finissons par 2 femelles qui ont de la bouteille… elles ont perdu la couleur dorée sur l’abdomen pour, elles aussi, se couvrir de pruine ; esthétiquement, ce n’est pas une réussite !

-1- The Naming of Australia’s Dragonflies, Ian Endersby & Heinrich Fliedner, Busybird Publishing 2015
-2- The Distribution of Australian Dragonflies, Ian Endersby
-3- The Complete Field Guide to Dragonflies of Australia par Günther Theischinger et John Hawking

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