J’ai été très surpris que ce petit Libellulidae, Brachygonia puella, appartienne à ce genre dont nous avions observé beaucoup plus souvent B. oculata ; en effet, si on retrouve les gros yeux et le thorax court et massif du genre, l’abdomen est totalement différent, beaucoup plus mince et légèrement arqué. Il est beaucoup plus proche de Chalybeothemis fluviatilis, que nous avons observé sur le même site, que de son cousin, ce qui est vraiment étonnant.
Ce n’est qu’en écrivant ces pages et en lisant Lieftinck (1) que je me suis rendu compte qu’il faisait la même observation : « Abdomen comparatively long and extremely slender, quite different in shape from the two other known species. ». Ces deux autres espèces sont B. oculata et B. ophelia.
Il y a donc peu de risque de confusion avec d’autres espèces, hormis celle citée, les autres Brachygonia sont très différents, beaucoup plus colorés (nous n’avons pas rencontré B. ophelia, aussi peu commun que B. puella).
Son abdomen ne mesure que 14 à 15 mm et en entier, il ne dépasse qu’à peine 22 mm.
Nous ne l’avons rencontré que sur les eaux noires et tourbeuses du Parc National de Maludam ; au bout de trois heures de bateau, notre progression sur la rivière est arrêtée par la forêt inondée et nous sommes descendus explorer le sous-bois. Quelques minutes après ces photos, mon matériel photo et moi-même passerons brièvement sous l’eau, ce qui mettra fin à mes photos pour la journée…
Brachygonia puella pourrait être endémique de Bornéo (Kalimantan et Sarawak), car une population historique sur l’ile de Belitung pourrait avoir disparu. IUCN Red List.
Il est en tout cas très rare, il n’y a qu’une quinzaine de photos sur iNaturalist.
Étymologie
Brachygonia (Kirby, 1889) du grec brachy, pour court, et du grec ancien gonia pour génération (dont on a fait gonade) certainement en rapport avec l’appareil génital secondaire peu proéminent sous le deuxième segment. Kirby écrit : » appendages of the second segment distinct, not very prominent. ».
Puella ; du latin puella, qui signifie fille, jeune fille, demoiselle, a été le 2° nom donné à un odonate dans la nouvelle nomenclature linnéenne pour Coenagrion puella. Lieftinck ne donne pas d’explication de ce choix, mais on peut supposer qu’il a trouvé l’espèce délicate, notamment par la minceur de l’abdomen qu’il souligne.
1- Lieftinck, 1937 – Descriptions and records of South–east Asiatic Odonata. Treubia 16: 55–119. P. 105.