Aeshna cyanea (Müller, 1764)

Aeshna cyanea mâle mature, Beaupréau, France-49), 22/08/2009
Aeshna cyanea mâle, La Salle-Aubry (France, 49), 09/09/2008

Description – Identification

Le mâle d’Aeshna cyanea, l’Aeschne bleue (avec un « c » !), n’est pas toujours bleu et en tout cas jamais complètement ; seul son abdomen porte parfois du bleu, alors que son thorax est jaune ou vert et porte de larges bandes ante humérale de la même couleur. L’abdomen porte des taches vertes, paires, sur la face dorsale des segments de S1 à S7, des taches vraiment fusionnées et bleues chez les sujets bien matures, sur les deux derniers segments, taches bleues également sur les côtés de l’abdomen. Il est magnifique !
Les ailes sont hyalines avec de petits ptérostigmas noirs, l’extrémité de ses appendices anaux est recourbée en bec de rapace, il mesure 67 à 76 mm, ce qui en fait un des plus grands odonates d’Europe.
En France, il est impossible de le confondre avec une autre Aeschne en raison de la largeur de ses bandes ante humérale, la fusion de la coloration bleue sur les derniers segments. Plus au nord, il est très proche d’Aeshna viridis.

Aeshna cyanea femelle, le Fuilet (France-49), 29/08/2011

Les femelles matures sont vertes et marron très sombre apparaissant parfois presque noir. Elles portent exactement les mêmes motifs thoraciques et abdominaux que les mâles, avec les larges bandes ante humérales et la fusion de la coloration sur les derniers segments.
Elles ne portent pas habituellement de coloration bleue, mais une forme rare présente toutes les taches abdominales bleues…
Bien sûr, les appendices anaux sont très différents, ne comprenant que les supérieurs, très divergents.
Pour les mêmes raisons que les mâles, il est difficile de les confondre avec une autre espèce.
A. cyanea femelle, le Fuilet (France-49), 29/08/2011

Habitat 

C’est un odonate que j’ai observé très souvent dans mon jardin, avant que ma petite mare entourée d’arbres n’héberge de grandes carpes… C’est un habitué des mares de jardin, des mares et étangs forestiers, il supporte bien les pièces d’eau relativement à l’ombre. S’il préfère les petits plans d’eau, il n’est pas absent des grands étangs et des lacs et dans le sud de la France, on le trouve également sur les ruisseaux ou les rivières lentes.
Il n’a pas de préférence quant à l’altitude et une donnée record le situe à près de 3000 m.

Distribution géographique

Il est présent dans tous les départements métropolitains français.
Il est présent en Angleterre et dans le sud de la Scandinavie, jusqu’en Russie de l’Ouest et du Sud. Au sud-est, il atteint la Turquie et l’Iran. Il est cité en Algérie, mais semble absent des autres pays du sud de la Méditerranée.
Atlas Dynamique des Odonates de France
IUCN Red List

Comportement – Écologie

Si sur une petite mare forestière en plaine, significativement à l’ombre, on observe un grand odonate, de vol rapide et erratique ou parcourant une galerie forestière, en particulier en fin de journée, c’est sans doute Aeshna cyanea. On peut ainsi les observer à distance des points d’eau.
Ils volent parfois assez tard le soir, entrent dans les maisons et on m’a plusieurs fois apporté des sujets desséchés, trouvés dans des lieux habités. Ils n’apparaissent pas vraiment apeurés par les humains et viennent souvent à proximité, comme s’ils étaient curieux.
Les mâles sont vigilants et surveillent les mares, pratiquant fréquemment le vol stationnaire, ce qui permet de les shooter en vol.
Les accouplements, très rarement observés, sont sans doute brefs ; je n’en ai vu qu’un sans avoir le temps de faire de photos.
La ponte qui s’ensuit utilise les mousses, les végétaux en décomposition ou les bois flottants, occasionnellement le sac à dos du photographe ou ses bottes, ce qui m’est arrivé en novembre 2011. Les femelles en ponte perdent alors tout sens du danger et l’impériosité du besoin de pondre permet de les approcher de près.
Les larves vont passer un an ou deux dans l’eau et effectuer 10 à 15 mues avant leur émergence estivale.

Il faut lire les patientes et minutieuses observations de Paul-André Robert dans « Les Libellules », Delachaux et Niestlé -1958, qui apportent un magnifique moment d’Histoire Naturelle, comme on savait si bien les écrire…

Période de vol

L’Aeschne bleue apparaît au tout début de l’été, fin juin ou début juillet et si les conditions sont bonnes, on peut encore le voir voler jusqu’en novembre, mais le pic de sa présence est atteint en août.

Étymologie

Aeshna (1) est un cas particulier dans l’étymologie des noms d’odonates. Il est ici écrit dans sa version originale, et on a en effet, en Europe, l’habitude de l’écrire sans « c », la version de Fabricius (1775) qui a créé le nom de genre Aeshna.
On suppose, car il ne l’a pas précisé, que Fabricius a formé ce nom depuis un mot grec signifiant défigurer ou ternir (pourquoi, c’est une autre énigme ?) ; mais Fabricius est un latiniste puriste et on ne peut expliquer cette absence de « c  » que par une erreur de transcription ou une erreur typographique.
L’absence de ce « c » n’est restée la norme que pour le genre Aeshna dans le langage scientifique et tous les autres noms de genre « composés » l’ont intégré, comme Austroaeschna en Australie ou Heliaeschna en Asie.
Et il faut bien noter que ce « c » est réapparu dans le nom de genre français, il ne faut pas l’oublier : Aeschne bleue ou Aeschne des joncs…
Cyanea, du grec kyaneos, de la couleur du lapis-lazuli, nous réconcilie avec l’étymologie et voudrait indiquer une couleur bleue dominante ; « l’Aeschne bleue » dans le langage commun en est malheureusement la traduction littérale qui induit en erreur nombre de naturalistes débutants. Aeshna affinis, presque aussi commune en France, est beaucoup plus bleue !

-1- The Naming of Australia’s Dragonflies, Ian Endersby & Heinrich Fliedner, Busybird Publishing 2015 (pour Aeshna)

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