Sarawak- Nannophya pygmaea (Rambur, 1842)

Nannophya pygmaea mâle, Bornéo, Kuching, Sama Jaya Nature Reserve, 18/03/2025
Nannophya pygmaea mâle, Bornéo, Kuching, Sama Jaya Nature Reserve, 18/03/2025

Cela faisait une douzaine d’années que je rêvais de revoir Nannophya pygmaea (1), sans doute le plus petit Libellulidae connu.
Les mâles matures sont absolument magnifiques dans leur habit rouge qui contraste avec le vert des herbes qui les entourent et qu’ils choisissent comme perchoir. Ils aiment le soleil, ce qui n’est pas le cas des femelles et des immatures, ils sont vifs et rapides, pas trop difficiles à approcher.

Huit Nannophya sont décrits, les trois derniers seulement en 2020, l’un au Laos, l’autre en Australie, le dernier en Corée.

Il est impossible de les confondre avec une autre espèce, à Bornéo ou ailleurs. Ils sont d’un rouge éblouissant, qui donne d’ailleurs bien du mal aux appareils photos, qui perdent tous les détails dans cette lumière si particulière. Et si petits qu’on confond les mâles immatures et les femelles avec des hyménoptères ou des diptères.
Rambur écrit qu’il ne fait pas 2 centimètres, Ngiam et Ng (2) lui donnent une longueur totale de 16 à 17 mm.

Nannophya pygmaea mâle, Bornéo, Kuching, Sama Jaya Nature Reserve, 18/03/2025

La nervation est très peu dense et la base des ailes est ambrée.

Comme de nombreux Libellulidae, c’est un adepte de « l’obélisque », posture verticale de thermorégulation, qui lui permet limiter la surface de son corps qu’il expose au soleil.

Nannophya pygmaea mâle, Bornéo, Kuching, Sama Jaya Nature Reserve, 18/03/2025

Nous l’avons rencontré en bordure de forêt humide, voire inondée, en limite des tourbières marécageuses, dans des zones ouvertes, pour les mâles matures. Les femelles sont plus discrètes et nous ne les avons vues qu’en forêt ou à l’ombre de ses limites, comme les mâles immatures.
C’est sur cet espace inondé entre buisson et chemin que nous avons rencontré nos premiers Scarlet dwarf (ou Scarlet Pigmy) du séjour, terrain qu’ils partageaient avec Ceriagrion cerinorubellum, Agriocnemis femina et Acisoma panorpoides.

Il fait partie de ces espèces dans lesquelles les mâles peuvent être territoriaux, surveiller et dominer un territoire. Ou, s’embusquer à faible distance et intercepter les femelles venant à l’eau, une stratégie sans doute moins coûteuse énergétiquement, mais qui s’avère en général moins fructueuse (3).

Scarlet dwarf male, Borneo, Kuching, Sama Jaya Nature Reserve, 18/03/2025
Nannophya pygmaea mâle, Bornéo, Kuching, Sama Jaya Nature Reserve, 18/03/2025

Les mâles immatures sont beiges et blancs pour l’abdomen, moins spectaculaires que les mâles matures et aussi moins que les femelles que je trouve somptueuses.

Mêmes jeunes comme celles-ci dessous, leur abdomen montre une spectaculaire alternance d’anneaux clairs et sombres. Leurs yeux sont encore clairs, leurs ailes brillantes, ce qui témoigne de leur jeune âge.

Je ne l’ai contacté qu’une seule autre fois, en Malaisie.

On le rencontre de la Nouvelle-Guinée à l’Indonésie, à Bornéo, aux Philippines, dans le sud de la Thaïlande et du Vietnam, au sud-est de la Chine et à Taïwan, jusqu’en Corée et au Japon.
Je mets ici le lien vers L’IUCN Red List, en espérant qu’un jour les données valides soient mises à jour, car pour l’instant, j’ai l’impression que la distribution est traitée pour le genre Nannophya et non l’espèce pygmaea. Ou alors, et ce serait très surprenant, il a été intégré cette très curieuse donnée que l’on trouve sur le site Odonata of India, d’un N. pygmaea ou Northern pygmyfly pris en Assam (Inde de l’est), qui n’a absolument rien à voir avec l’espèce en question !

Les femelles deviennent nettement plus sombres et magnifiques en maturant.

Nannophya pygmaea femelle, Bornéo, Lorong Matang Jaya 9b, 19/03/2025
Nannophya pygmaea femelle, Bornéo, Lorong Matang Jaya 9b, 19/03/2025

Étymologie
Nannophya (4) du grec νᾶνος ou νάννος qui signifie nain et de φυή pour stature. Rambur (1), qui crée ce genre justement pour N. pygmaea, écrit : « J’ai formé ce genre sur la plus petite espèce de Libellulide connue et dont je n’ai vu que la femelle« .
Pygmaea, du grec pygmaios – long comme un poing, nabot, puis du latin pygmaeuspygmée. Rambur a donc choisi d’insister pour le nom de genre et le nom d’espèce sur la taille minuscule de l’insecte.

1- Rambur, Jules (1842) – Histoire naturelle des insectes. Névroptères – Librairie Encyclopédique de Roret. pp. 534 [27]
2- 2- Robin Ngiam & Marcus Ng – A photographic guide to the Dragonflies and Damselflies of Singapore – John Beaufoy Publishing – 2022
3- Yoshitaka Tsubaki & Tomohiro Ono, 1987 – Effects of age and body size on the male territorial system of the dragonfly, Nannophya pygmaea Rambur (Odonata: Libellulidae) – Animal Behaviour 35(2) : 518-525.
4- Ian Endersby & Heinrich Fliedner, The Naming of Australia’s Dragonflies, Busybird publishing, 2015.

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